« L’église de Semur est un des monuments les plus remarquables de la Bourgogne. Elle se distingue non seulement par la grâce et la légèreté de son architecture, mais encore par le fini extraordinaire de tous ses détails : depuis la base jusqu’au sommet, elle est couverte de sculptures charmantes qui se peuvent comparer avec ce que le XIIIe siècle a produit de plus élégant » Prosper Mérimée, 1844
« Mon cher Victor, j’ai vu à Semur un bijou d’église qui vaut qu’on fasse le voyage pour elle seule » extrait d’une lettre du peintre Louis Boulanger à son ami Victor Hugo.
C’est au tout début du XIe siècle que quelques moines bénédictins venant de l’abbaye de Flavigny s’installent à Semur-en-Auxois.
Afin de ne pas créer de conflit avec les moines du prieuré Saint Maurice, présents depuis le VIe siècle dans le quartier du château, les moines de Flavigny choisissent un espace à l’écart du méandre.
En 1154, le pape Anastase IV confirme la possession à l’abbaye de Flavigny et en 1181, les droits de justice sont cédés au prieur par Hugues 1er de Bourgogne. Enfin, en 1198, le Duc de Bourgogne Odon donne aux chanoines tous les bénéfices de sa chapelle de Semur.
Autant dire que tous ces privilèges octroyés au fil des siècles aux moines de Notre-Dame sont très mal perçus par ceux du prieuré Saint-Maurice, qui y voient une perte de leurs prérogatives mais aussi de leurs revenus.
Si une première église Notre-Dame a été édifiée dans les années 1060, le manque de sources tant au niveau des archives qu’au niveau de l’archéologie ne permet pas de donner des éléments tangibles de cette construction. On peut cependant supposer que le développement de l’habitat sur le plateau, l’octroi des privilèges sont des facteurs importants dans la décision de construire une nouvelle église qui sera plus vaste et fera rayonner le quartier Notre-Dame dans la ville et au-delà.
Cette construction s’inscrit totalement dans l’essor démographique du XIIIe, s’accompagnant du développement urbain que l’on constate alors partout en France. Et si à Semur, l’habitat primitif était essentiellement concentré dans le quartier du château, les XIIe et XIIIe siècles vont voir l’habitat se répandre le long de la rivière, sur le plateau et sur les chaumes.
Différentes donations faites au prieuré Notre-Dame en cette fin du XIIe et début du XIIIe permettent d’envisager sereinement la construction d’un nouvel édifice dans le style « francigenum opus » ou œuvre française alors en plein essor et que les artistes de la Renaissance italienne comme G.Vasari nommeront architecture gothique.
Ainsi, la construction commence dans les années 1220 débutant par l’abside avec ses trois chapelles rayonnantes et le déambulatoire avant de se poursuivre par le choeur, le transept et les premières travées de la nef. Cette première grande campagne de construction s’étale jusque dans les années 1240.
Trois travées dans la nef vont être ajoutées dans la deuxième moitié du XIIIe avec un achèvement au niveau du portail au début du XIVe.
La pierre utilisée pour la construction est un calcaire à entroques du Bajocien inférieur, extrait des carrières de Pouillenay et acheminé par charrois jusqu’à Semur. Ce matériau est plus facile à travailler que la pierre locale qu’est le Sinémurien. Son grain fin et la présence des nombreux fossiles de gryphées, ammonites, nautiles et rostres de bélemnites rendent sa mise en œuvre difficile. Toutefois, cette magnifique pierre aux subtiles teintes anthracite a été utilisée pour le dallage des bas côtés et du déambulatoire et s’harmonise remarquablement avec le ton ocre du calcaire Bajocien.
Les vastes forêts environnantes pourvoient en bois en quantité nécessaire pour la fabrication aussi bien des échafaudages, que des engins de levage et des charpentes.
Le chantier de construction de l’église Notre-Dame, de part sa dimension crée un véritable village au coeur de la ville, attirant artisans, compagnons se déplaçant de chantier en chantier dans ce XIIIe siècle foisonnant de bâtisseurs.
Un remarquable livre de pierre
La qualité architecturale de l’édifice, la richesse ornementale et la maîtrise dans l’exécution laissent à penser que de grands artisans sont venus à Semur, compagnons désireux de transmettre leur savoir. D’ailleurs, des clés de voûtes représentant les arts libéraux (grammaire, dialectique, rhétorique, arithmétique, musique, géométrie, astronomie) permettent de supposer qu’un enseignement était dispensé par les compagnons.
La richesse des sculptures fait de l’église un remarquable livre de pierre qui a traversé les siècles s’enrichissant au fil du temps, mêlant différents styles, comme en témoignent les nombreuses chapelles aménagées entre les contreforts entre le XVe et le XVIIe.
L’élégance de la construction gothique est magnifiée par la diversité ornementale qui s’offre au regard : contreforts coiffés de chaperons et fleurons, pinacles s’élançant hardiment, gargouilles truculentes, visages empreints de piété, ensembles sculptés évoquant la vie quotidienne comme le remarquable calendrier de pierre qui orne les voussures de la porte des Bleds. Quant à l’intérieur, le regard se laisse captiver par la richesse des détails qui ornent chapiteaux, culs de lampe ou bien encore les clés de voûtes, le regard porte loin vers les arcatures et les voûtes. C’est aussi la rencontre entre l’iconographie sacrée et l’iconographie profane dont la diversité s’exprime sur la richesse des matériaux utilisés. En effet, pierre, bois, vitrail, métal sont autant de supports d’expressions artistiques de grande qualité.
Lorsque le bourg Notre-Dame est fortifié au milieu du XIVe siècle, le système viaire de ce quartier s’organise en grande partie autour de la place Notre-Dame puisque les cinq portes d’accès au quartier menaient à cet espace de dégagement situé devant l’église.
Quelques chiffres :
longueur totale 73 mètres
largeur : 24 mètres
hauteur des tours:42 mètres
hauteur du clocher : 58 mètres
A l’intérieur :
hauteur des voûtes de la nef : 20,60 mètres